Nous sommes dans la traversée du gué de la pandémie avec de l’eau allant du mollet au cou selon notre taille à chacun. Puis nous entrerons dans la traversée du désert économique ? Déjà on nous parle des transformations que nous devrons vivre comme si elles allaient de soi pour leurs auteurs. À vivre la crise actuelle, imaginer le futur et se laisser guider par la pression extérieure, nous entretenons nos angoisses. Comment vais-je m’en sortir ? Aurais-je assez de moyens ? Et s’il m’arrive ceci ou cela ? Que vais-je leur dire ? Et s’ils me posent des questions ? Je les entends déjà me dire…
À vrai dire, si les émotions nous semblent très fortes (et elles le sont), elles ne sont pas caractéristiques de ce moment. Il y a quelques semaines, au moment de l’annonce du confinement, je les traversais alors je me suis rappelé mes enseignements de joueur de rugby, de ces instants où il m’a fallu verser une larme pour libérer cette pression de ma première finale de coupe ou de ma première sélection nationale. Je me suis rappelé aussi ces moments professionnels de stress où nous attendions la réponse de nos clients sur le choix de leur fournisseur pour le système d’énergie de ses stations cellulaires pour les années à venir (des contrats d’une valeur annuelle de 2 M€ à 10 M€). Ces commandes conditionnaient le quotidien de 280 personnes. Nous ne les avons pas toutes gagnées mais Dieu que l’équipe faisait du bien dans les quelques échecs et les nombreux succès.
Pour utiliser au mieux ces émotions, voici quelques petits trucs.
Étape 1 : Se ramener sur l’instant présent en s’appliquant les pratiques que nous utilisons dans les compétitions.
N’essayez pas de vous raisonner, de refouler vos émotions et encore moins de vous culpabiliser de les avoir. Elles amènent avec elles une production biochimique interne qui peut vous être utile ou néfaste selon la manière dont vous l’utilisez. Accueillez-les pour pouvoir vous en distancer ! Peut-être même maintenant si ce passage est pour vous une découverte ! Posez-vous, éventuellement assis mais de manière tonique (sur une chaise ou un tabouret le dos droit). Mettez une main sur votre abdomen et respirez le plus profondément possible en sentant votre ventre se gonfler, expirez plus lentement que vous inspirez. En expirant par la bouche, c’est plus facile à contrôler. Faites cela 3 à 5 fois sans chercher rien d’autre que de vous concentrer sur cette respiration. En le faisant, vous vous recentrez sur le moment présent. Ces techniques sont largement employées en pleine conscience. Nous serons heureux de recommander des instructeurs hautement qualifiés dans l’accompagnement à la méditation à ceux qui sont intéressés. Mais revenons au sport.
Voici pour vous un exemple de ces principes mis en action. Le haka des All Blacks
Le haka, aujourd’hui bien connu, des All-Blacks de Nouvelle Zélande est à l’origine une danse que les peuples Maori faisaient à diverses occasions pour marquer leur respect. Si le haka est un attachement aux traditions des peuples originaires de Nouvelle Zélande, observez cependant le rythme donné dans la vidéo. Les joueurs commencent par respirer profondément puis entameront leur cri dans un rythme qui reprend une suite d’inspirations et d’expirations plus lente. Observez la synchronisation très travaillée des joueurs. Le haka ne construit pas une équipe, mais une grande équipe peut faire un grand haka. Parce qu’il a été travaillé à l'entraînement, les joueurs se recentrent en fait sur le moment présent, libérant les émotions en énergie qu’ils utiliseront pour entamer le match.
Étape 2 : En se remettant dans le temps présent, on peut alors regarder la réalité du moment. Quelle est-elle ?
leadership
- Nous vivons un des grands moments de l’histoire planétaire.
- Il est inédit parce qu’il concerne la planète entière et que nous sommes en communication en temps réel.
- La solution est collective. Collectif que paradoxalement souligne la distanciation sociale.
- Que savez-vous de la situation actuelle de vos collaborateurs, de votre supérieur ?
- Quels sont les indicateurs de votre organisation dans l’instant ?
- Quel est votre échéancier ?
- Quelles sont les aides disponibles ?
- Qu’est ce qui est important pour vous maintenant ? Peut-être est-ce aussi banal que d’avoir envie de manger un fruit ou de dormir.
Pour vous aider à bien détacher les émotions de la réalité, n’hésitez pas à prendre une feuille de papier et y tracer deux colonnes. Dans la colonne de droite, vous écrivez vos émotions et dans celle de gauche les faits réels. Ce sont ces derniers et seulement ceux-là qui justifient votre action.
Étape 3 : De la réalité à la finalité
En pleine conscience du moment présent et de sa réalité, vous pouvez maintenant (re) définir votre finalité et, dans le cas qui nous rassemble, votre finalité professionnelle. En tant que leader pensez à celle de votre organisation. Les deux finalités ne sont pas forcément les mêmes.
Étape 4 : L’action vient naturellement.
Attention, si vous êtes sous la contrainte d’un objectif impératif à moyen ou à long terme, ne vous fixez pas sur cet objectif. Supposons que la description de votre réalité à l’étape 2 présente l’obligation d’obtenir un résultat financier pour simplement survivre. Cette nécessité crée immanquablement du stress. C’est inévitable et c’est en fait une manifestation de votre corps pour vous permettre d’agir et sortir de l’impasse. Cette obligation est à atteindre dans le futur et donc dans l’état présent, il n’est pas encore atteint. Cela reste vrai jusqu’au dernier instant. Ainsi les grands joueurs de golf ou de tennis, les grands buteurs de rugby ont cette capacité à rester concentrés sur la balle qu’ils vont frapper ou le point à marquer dans l’instant. Avant de l’exécuter, ils préparent leur geste technique en visualisant le prochain but, la trajectoire, le mouvement.
Si l’émotion remonte, reprenez à l’étape 1 autant de fois que nécessaire pour rester dans le temps présent et comprendre que vous avez cette profonde capacité d’agir. Revenez sans cesse au présent. Il est inutile de rester « scotché » à cette nécessité du futur ou de regretter le passé.
Bien sûr, un indicateur qui permet de voir l’avancée vers votre objectif est utile et nécessaire. Tout en restant concentré sur les actions présentes et en mesurer les effets, il permet d’en définir des nouvelles si l’évolution ne paraît pas suffisante ou assez rapide.
De vous à votre organisation
Il y a plus qu’un pas. Votre organisation est une énorme responsabilité qui pèse sur vos épaules et peut-être vous sentez-vous bien seul dans ces moments difficiles. Vos collaborateurs et vos collègues sont aussi une ressource infiniment puissante pour ne pas être seul, pour réussir et être heureux.
Si vous êtes leader d’une organisation ( plus que 2 personnes) et vous en êtes à cette étape, il faut intégrer les réflexions fondamentales. Vos collaborateurs ont également leurs émotions et celles-ci expliquent leurs comportements potentiels (agressivité, trouille, passivité, absence potentielle). Votre finalité, probablement, et votre but, possiblement, ne sont pas forcément ceux de l’organisation. Vous n’avez aucune chance de les convaincre si cela ne répond pas aux fondamentaux qui gouvernent les organisations qui gagnent. La finalité de votre organisation est celle qui rassemble vos collaborateurs en leur permettant de contribuer chacun au même mouvement. Plus spécifiquement, à la reprise des activités, vous avez quatre tâches à accomplir
- Ramenez-les sur le but de votre entreprise et vous observerez une énorme capacité de résilience même dans la difficulté.
- Assurez-vous qu’ils sont confiants de pouvoir y contribuer. Donnez-leur la formation nécessaire. Enlevez ce qui est pour eux un obstacle
- Gardez les informés du résultat collectif. Réjouissez-vous des petits pas.
- Permettez-leur de récupérer physiquement et mentalement. Éventuellement, obligez-les à récupérer.
Ces recommandations sont valables que votre organisation reprenne après une interruption des activités ou qu’elle ait poursuivi ces activités pendant le confinement. En effet, la simple reprise générale des activités impacte la vie de tous les individus.
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